jeudi, novembre 10, 2005

Le complexe de Di de Dai Sijie


Les aventures rocambolesques d’un psychanalyste chinois

Ainsi pourrait s’intituler ce livre de Dai Sijie. Muo, un homme d'une quarantaine d’années est le seul psychanalyste de Chine. Il a étudié en France et est un disciple de Freud dont il a appris l’art d’interpréter les rêves. Ses études terminées, il revient dans son pays afin d’essayer d’y gagner sa vie en interprétant les rêves moyennant un tarif raisonnable. Mais, il apprend qu’une ancienne copine d'université, Volcan de la Vieille Lune, photographe, est emprisonnée pour avoir vendu à la presse européenne des clichés pris en cachette de tortures pratiquées par des policiers chinois. Elle attend le jugement du tribunal. Muo tente de la faire libérer en offrant un pot de vin de dix mille dollars au juge Di Jiangui qui est chargé de l’affaire. Mais le juge Di ne veut pas de l’argent de Muo. Il est riche à en crever et n’a pas besoin de plus d’argent. La seule chose qu’il demande à Muo pour la libération de son amie, c’est une vierge avec qui coucher. Une fille qui n’a pas encore perdu sa virginité.

Muo part donc à bicyclette, un étendard flottant derrière lui et annonçant son activité d’interprète des rêves ambulant. Bien sûr, sa clientèle est surtout composée de femmes. Muo concentre son activité en particulier, dans un quartier surnommé « Le Marché aux femmes de ménage » regroupant plusieurs jeunes filles désirant trouver un emploi. Il réussit à trouver une femme d’une quarantaine d’années, embaumeuse de son état et encore vierge, qui accepte un rendez-vous avec le juge mais l’affaire rate. Une jeune fille de dix-sept ans surnommée Petit Chemin, accepte également la rencontre avec le juge mais, au dernier moment, elle s’enfuit. Muo se voit forcé de continuer sa quête d’une vierge afin de satisfaire le pervers juge et délivrer son amie dont il est amoureux.

Voici en gros l’histoire de ce récit rocambolesque très drôle. Je l’ai lu avec plaisir et apprécié l’écriture colorée de Dai Sijie. Les personnages sont à la limite de la caricature et l’imagination de l’auteur est complètement débridée. Chaque chapitre constitue une petite histoire en soi qui s’imbrique dans un tout pour composer un récit amusant et rempli d’humour. J’ai beaucoup appris sur la Chine et certains faits sont à peine croyables comme ce restaurant où on sert aux clients, des bébés rats nouveau-nés que les convives saisissent avec leurs baguettes, trempent dans des sauces épicées et croquent vivants. Et que dire de cette scène d’embaumement où Muo doit transporter le cadavre d’une femme sur plusieurs étages du laboratoire, une scène décrite avec beaucoup de détails dégoûtants. D’ailleurs, Dai Sijie excelle dans la description de faits sordides et rebutants. Et la scène de la machine à laver absolument hilarante. Le moindre détail n’échappe pas à son œil de cinéaste. C’est une écriture en gros plan. Le livre est rempli de scènes plus rocambolesques les unes que les autres. Oui, j’aime bien Dai Sijie. Il m’intéresse et me fait rire. Il me parle de la Chine avec humour et dérision. C’est un écrivain et un conteur qui n’a pas fini de m’étonner. Quand nous offrira-t-il le bonheur d’un nouveau livre ?

L’auteur : Dai Sijie est né en 1954 dans la province chinoise de Fujian. Son père est médecin. Après des études à l’Institut des Hautes Études cinématographiques en France, il réalise sont premier film « Chine, ma douleur ». Son premier roman intitulé « Balzac et la Petite Tailleuse chinoise » a été vendu en France à plus de 250 000 exemplaires, traduit en 25 langues et couronné de nombreux prix. « Le Complexe de Di » a remporté le prix Femina 2003. Dai Sijie vit en France depuis une quinzaine d’années.

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